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La littérature 'concentrationnaire' dans la Bibliothèque du CegeSoma

La littérature 'concentrationnaire' dans la Bibliothèque du CegeSoma. Sous ce titre, nous vous invitons à découvrir le sixième thème de notre série ‘les rendez-vous du bibliothécaire’. Chaque thème repris sera l’occasion de vous plonger dans nos collections et sera illustré par une vidéo et un texte complétant les informations s’y trouvant.

Visionnez la sixième vidéo ‘Les rendez-vous du bibliothécaire : 6. La littérature 'concentrationnaire' dans la Bibliothèque du CegeSoma.

Vu la nature « totalitaire » du nazisme et son  modus operandi  extrêmement brutal accumulant les éléments hostiles comme à plaisir, les lieux de détention et autres « camps de concentration » destinés à accueillir les ennemis POLITIQUES du régime n’ont pas manqué de fleurir outre-Rhin de 1933 à 1945.

A partir de l’été 1940…et surtout de l’été 1941, les « prisonniers politiques » belges se sont multipliés, remplissant d’abord les  « sections allemandes » des prisons du pays ainsi que les sinistres forts de Breendonk et de Huy mais aussi les cellules des diverses officines policières ou para-policières germaniques, en attendant d’être transférés et de se perdre dans la nébuleuse concentrationnaire du IIIè Reich. Si on ne connaît pas exactement le nombre précis de ces déportés « non-raciaux », le statut de « prisonnier politique » a été officiellement concédé à 41.257 personnes en Belgique, et parmi celles-ci on enregistre près de 14.000 morts.

Une  part des survivants  - une part au fond assez faible - a éprouvé le besoin de coucher sur le papier le récit de ce tragique parcours derrière les barbelés, et leur témoignage, édité, figure pour la plus grande part dans les collections du Centre.

Les premiers témoignages de « concentrationnaires » sont édités assez tôt, dès l’automne 1944, et ils sont en général le fait d’anciens détenus de Breendonk relâchés par l’ennemi et présents en Belgique à la Libération, qu’il s’agisse de Frans Fischer (L’Enfer de Breendonck-1944), de Boris Solonevitch (Breendonck, camp de tortures et de mort-1944) ou de Victor Trido (Breendonck, camp du silence, de la mort et du crime-1944). Toutes ces productions, généralement rédigées en français au départ, ont bénéficié d’une traduction dans la langue de Vondel. Puis un peu plus tard, après l’écroulement du Reich hitlérien, on a vu fleurir différents titres, différents témoignages d’anciens « politiques » ayant séjourné qui à Dachau, qui à Buchenwald (longtemps considéré comme le plus terrible et le plus connu…), qui à Ravensbrück, qui…
On peut épingler ici les écrits  assez exemplatifs  d’un Omer Habaru (Les triangles rouges-1946) ou ceux, un peu plus tardifs mais magistraux dans tous les sens du terme, d’un Léon-Ernest Halkin (A l’ombre de la mort-1947). Ce type de littérature-témoignage, parfois avec intentions militantes (« Plus jamais ça ! ») subsistera longtemps dans la mouvance d’associations d’ « anciens » ( ainsi R. Buelens , avec De concentratiekampen en de gedetineerden-1970, édité par la Nationale Confederatie der Politieke Gevangenen.).
Ce n’est qu’une génération plus tard qu’apparaîtront des approches du phénomène concentrationnaire à ambitions plus scientifiques (mais pas toujours dénuées d’intentions politique sous-jacentes) comme celles de Daniel Rochette et de Jean-Marcel Van Hamme ( Les Belges à Buchenwald et dans ses commandos extérieurs-1976) ou de Christine Somerhausen et de Brigitte d’Hainaut (Dora 1943-1945-1991).

Enfin, dans les années 1990, on voit émerger des contributions purement scientifiques, le processus d’historicisation du phénomène concentrationnaire étant à ce moment en voie d’accomplissement. Et l’on peut épingler à ce niveau les ouvrages d’un Patrick Nefors (Breendonk, 1940-1945. De geschiedenis-2004, avec édition française chez Racine en 2005) ou d’un Gie Van Den Berghe  (Getuigen. Een case-study over ego-documenten. Bibliografie van ego-documenten over de nationaal-socialistische kampen en gevangenissen, geschreven of getekend…-1995).

Est-il besoin de faire remarquer que TOUS les récits de vie de ces détenus d’un genre si particulier n’ont pas été publiés : un certain nombre d’entre eux figure dans notre sous-section « Journaux Personnels » et attendent peut-être un vaillant historien pour les ramener à la lumière et –qui sait ?- les mettre à la disposition du « grand public cultivé », avec l’appareil critique ad hoc.

Les chercheurs tentés par cette problématique, mais encore profanes, pourront alors recourir utilement au numéro 14-15 de la série « Jours de guerre » portant le titre de Jours barbelés. Il présente une bonne synthèse d’une question qui a été abordée jusqu’ici plutôt sous un angle francophone…