Commémorer l’Holocauste dans les espaces verts : tensions et contestations à Londres et à Amsterdam

Conférence-débat avec, en invitée, Alana Castro de Azevedo.
Un entretien mené sous la direction de Bruno Benvindo.
Aujourd’hui, un peu partout, les monuments existants font l’objet de débats et de contestations. Mais qu’en est-il des nouveaux monuments ? Ne sont-ils pas parfois controversés avant même d’exister ?
Les processus de construction de mémoriaux dans l’espace public sont souvent longs et complexes. Ils mobilisent de nombreux acteurs et se déploient en plusieurs étapes : conception du projet, recherche de financements, choix du site et de l’artiste, obtention des permis d’urbanisme, etc. Les visions et intérêts des personnes impliquées dans ce type de processus s’opposent parfois fondamentalement.
La construction d’un mémorial est un processus à la fois compliqué, politisé et loin d’être consensuel. Pour l’illustrer, Alana Castro de Azevedo a mené une analyse comparative à travers trois cas concrets : la création de deux mémoriaux en hommage aux victimes de l’Holocauste, à Amsterdam, l’Holocaust Namenmonument et à Londres, le UK Holocaust Memorial and Learning Centre, ainsi que celle d’un mémorial dédié aux victimes de l’esclavage colonial à Lisbonne. Bien que chaque projet soulève des enjeux spécifiques — qu’il s’agisse du choix de l’artiste, de l’emplacement du mémorial ou de l’influence des citoyens et autres parties prenantes sur les décisions — tous ont en commun d’avoir suscité des controverses.
Au-delà d’une simple description des enjeux propres à chaque cas d’étude, elle s’est également interrogée sur comment concilier le travail de mémoire avec d’autres préoccupations, comme la préservation des espaces verts en milieu urbain ?
Qui doit être impliqué dans ces processus ? Qui détient le pouvoir de décision ? Est-il possible, à travers un processus participatif, d’aboutir à un résultat accepté à l’unanimité ?
C’est à ces questions, issues de cinq années de recherches effectuées dans le cadre de sa thèse de doctorat consacrée à l’analyse des processus de construction des mémoriaux dans l’espace public qu’Alana Castro de Azevedo répondra le jeudi 19 juin. Son objectif est de proposer un nouveau regard sur les enjeux de la mémorialisation dans les espaces verts, tout en réfléchissant à comment rendre les processus commémoratifs plus inclusifs et démocratiques. Elle se penchera plus précisément sur les mémoriaux d’Amsterdam et de Londres. Le débat sera animé par Bruno Benvindo.
Cet événement se déroulera dans la salle de conférence du CegeSoma dans le cadre des Rencontres d’Histoire Publique, en partenariat avec l’asbl 'Les Amis du CegeSoma'.
Alana Castro de Azevedo est docteure en sciences politiques de l’Université Libre d’Amsterdam. Sa thèse de doctorat, soutenue en 2025, examine la participation citoyenne dans le processus de création de mémoriaux commémorant les victimes de l'esclavage colonial et de l'Holocauste, ainsi que sur les nombreux conflits qui en découlent. De 2016 à 2019, elle a travaillé à la mise en œuvre du projet La Route de l’esclave de l’UNESCO, axé sur l’identification et la valorisation des lieux de mémoire et des sites patrimoniaux liés à l’esclavage et à la traite transatlantique. Depuis 2024, elle mène des recherches au CegeSoma sur les controverses liées aux patrimoines coloniaux dans l’espace public, dans le cadre du projet européen CONCILIARE.
Bruno Benvindo est historien. Il a travaillé comme chercheur à l’Université libre de Bruxelles, puis au Centre d’Études et de documentation Guerre et Sociétés contemporaines (CegeSoma) où il a notamment publié ‘Henri Storck, le cinéma belge et l’Occupation’ (2010) ainsi que ‘Décombres de la guerre. Mémoires belges en conflit, 1945-2010’ (2012, avec Evert Peeters). Il est aujourd’hui directeur des expositions au Musée Juif de Belgique, où il met en place un programme d’expositions interrogeant les croisements entre art et histoire au 20e siècle.